Les problèmes de disque ? Qui cela peut-il bien intéresser ?

Index

  • Douleurs lombaires ? Des anomalies des vertèbres sont visibles
  • Douleurs lombaires ? Aucun signe visible
  • Les douleurs lombaires chroniques demeurent un mystère dans 80 % des cas
  • Apparemment, les douleurs lombaires « aspécifiques » sont toujours d’actualité
  • Les scanners actuels ne suffisent-ils pas ?
  • Le changement, c’est maintenant ?
  • Pourtant nous arrivons à voir des trous noirs à des années-lumière de la Terre
  • Les douleurs lombaires, une affection de l’âme ?
  • Aucune preuve scientifique d’un « esprit lombaire »
  • On ne sait pas ou ne voit rien ? L’autopsie pourra nous en dire plus !
  • Il y a peu d’intérêt pour l’autopsie de la colonne vertébrale
  • Qui peut bien s’intéresser à ce « coussinet » entre les vertèbres ?
  • Références

Douleurs lombaires ? Des anomalies des vertèbres sont visibles

Vous souffrez depuis quelques mois de douleurs dans le bas du dos. Peut-être les ressentez-vous « quelque part dans le dos », difficiles à localiser et survenant de façon inattendue (douleur chronique intermittente). Ou peut-être ressentez-vous une douleur permanente, mais qui s’intensifie par moment (douleur chronique ondulante). Évidemment, vous ignorez ce qui provoque ce changement ! Personne ne le sait ! Ou bien peut-être appartenez-vous aux 20 % des chanceux pour qui un radiologue a décelé une anomalie « spécifique » de la colonne vertébrale (Fig. 1) (voir article « La cause de la lombalgie ne peut être déterminée avec certitude que dans 15 % à 20 % des cas »). Peut-être serez-vous chanceux et bénéficierez, espérons-le, d’un traitement adapté et efficace.

lage rugpijn

Fig. 1. Quelques signes reconnus d’anomalies osseuses de la colonne vertébrale : (1) anomalie congénitale, (2) fracture vertébrale, (3) spondylarthrite ankylosante (autrefois « maladie de Bechterew »), (4) plasmocytome, (5) hémangiome et (6) métastases.

Douleurs lombaires ? Aucun signe visible

Malheur à ceux qui souffrent du bas du dos sans qu’on ait, après de nombreuses consultations et examens cliniques, trouvé quoi que ce soit de visible par radio. C’est maintenant que les Romains s’empoignèrent : il va vous falloir prendre votre mal en patience ! Afin de pouvoir choisir quel traitement parmi tous ceux disponibles conviendra le mieux à une « anomalie », le médecin préféra toujours se baser sur quelque chose qu’il arrive à voir. Aïe ! Et il y a un autre problème ! Les technologies actuelles d’imagerie médicale telles que les rayons X, le CAT-scan et les IRMs ne permettent pas réellement de choisir le traitement adéquat. Dans le cas des douleurs lombaires chroniques, les images ne sont pas assez claires que pour prescrire un traitement avec certitude1,2,3,4,5,6,7,8,9,10. Aussi bien l’Association médicale américaine11 que le Centre fédéral d’Expertise des Soins de Santé12 ou les patients eux-mêmes13 déclarent qu’il n’existe presque aucun traitement efficace.

Les douleurs lombaires chroniques demeurent un mystère dans 80 % des cas

Si rien n’est visible, attendez-vous à recevoir tout un tas d’explications possibles (dont certaines assez farfelues) pour expliquer les symptômes dont vous êtes victime. Et comment peut-on réellement se forger une opinion certaine lorsqu’on ne « voit rien » ? Face à ce mystère qui ne semble pas désépaissir, toutes les explications sont bonnes, même les plus étranges (voir article : « La raison pour laquelle la lombalgie demeure un mystère »). Expliquez-moi comment un patient intelligent et sain d’esprit devrait réagir lorsqu’on lui dit que ses douleurs dorsales sont dues à sa rate, son foie ou un autre organe qui se serait mystérieusement se retourné ?

Apparemment, les douleurs lombaires « aspécifiques » sont toujours d’actualité

On considère toujours actuellement que les douleurs lombaires chroniques relèvent d’une cause « aspécifique » dans 80 % des cas, c’est-à-dire qu’elles sont « causées par un élément non spécifique ». Même en Flandre, et selon cet article de 2017 qui reprend le consensus actuel, cela ne choque personne d’entendre que le problème des douleurs lombaires ne « peut pas être expliqué d’un point de vue anatomique ». En d’autres termes, on ne peut pas l’expliquer par « quelque chose » dans le dos ! Étant donné le grand manque de connaissances médicales à ce niveau, les patients souffrant du bas du dos font là encore face à quelque chose de peu clair. Ce genre de diagnostics « médicaux » invraisemblables sont souvent acceptés sans remise en question. À vrai dire, plus personne ne sourcille : les médecins, les spécialistes, le personnel paramédical et les patients eux-mêmes. Personnellement, je refuse de débattre avec les gens qui n’ont que ces explications réchauffées à donner15.

Les scanners actuels ne suffisent-ils pas ?

Étonnant ! Les scanners existants sont inefficaces dans près de 80 % des cas de douleurs lombaires chroniques. Ils ne permettent pas de visualiser « quelque chose » qui permettrait de diagnostiquer avec certitude la cause des douleurs. Et la hernie, je vous entends déjà demander ? La hernie ne se déclare qu’après que les disques se soient déchirés. La fissure discale, souvent invisible, est la cause de vos douleurs lombaires. Faites-vous retirer votre « hernie » ; et vous aurez tôt fait de constater que vos douleurs sont toujours là… (Plus à ce sujet dans d’autres articles). C’est bien différent des 20 % restants, pour lesquels quelque chose est effectivement visible dans les parties osseuses de la colonne vertébrale (Fig. 2).

lage rugpijn

Fig. 2. Résultats après ablation de l’excroissance osseuse responsable d’une malformation congénitale de la colonne vertébrale chez un homme de 38 présentant des signes cliniques de compression médullaire. Sa taille a augmenté de 5 cm (2016 – avec l’aimable autorisation de monsieur A.V.)

Le changement, c’est maintenant ?

Espérons-le ! Les scanners existants sont encore loin de pouvoir « voir » les processus chimiques et biologiques responsables des inflammations et douleurs discales. Peut-être que la découverte la plus importante dans ce domaine fut le « Clarity Scan »16 dévoilé par le professeur Karl Deisseroth (bioingénieur, docteur à l’université de Stanford et candidat au prix Nobel) en 2015. Imaginez que nous soyons capables, comme nous le faisons avec les souris, de visualiser très précisément les processus chimiques et biologiques à l’œuvre dans notre cerveau ! Je ne doute pas une seule seconde que le responsable des douleurs lombaires dans la majorité des 80 % restants soit à chercher dans une des trois structures du disque.

Pourtant nous arrivons à voir des trous noirs à des années-lumière de la Terre

Les phénoménologues sont parvenus à percevoir des « trous noirs » situés à des milliards d’années-lumière de la Terre. Ils en ont même trouvé l’explication. Mais lorsqu’il s’agit d’une personne qui souffre face à nous, on « ne voit rien du tout ». Aucun expert du dos n’a d’ailleurs réussi à me convaincre d’une hypothèse claire, démontrable objectivement et reproduisible universellement, qui puisse expliquer ces douleurs lombaires. Ça fait des années que je dois vivre avec, principalement parce que personne ne « voit rien » (et moi compris).

Les douleurs lombaires, une affection de l’âme ?

Lors de ma formation au sein de plusieurs universités, mes professeurs m’ont expliqué de façon très détaillée que l’Homme était fait d’un corps et d’une âme. Si la cause de près de 80 % de toutes les affections chroniques du bas du dos ne peut pas être expliquée par une altération anatomique de la colonne vertébrale14, le seul responsable qu’il reste, c’est l’esprit ! J’ai lu dans les « 48 lois du pouvoir » que tout ce qu’on ne pouvait expliquer anatomiquement relevait autrefois de l’esprit17.

Aucune preuve scientifique d’un « esprit lombaire »

Serait-il possible que la médecine, qui a déjà résolu les mystères de bien d’autres affections, puisse encore invoquer une action de l’esprit pour près de 80 % des patients souffrant de douleurs lombaires ? Le mystère des douleurs lombaires demeure depuis plus de 3000 ans18. Je suppose que la raison à cela explique pourquoi tant de personnes continuent de prétendre que ces douleurs découlent de « quelque chose dans votre tête »… jusqu’à ce qu’elles en souffrent elles-mêmes ! Jusqu’aujourd’hui, je n’ai pas encore entendu parler, vu ou même lu la moindre preuve objective de douleurs dorsales provoquées par l’esprit. J’ai bien lu, par contre, que les douleurs aiguës et chroniques apparaissaient dans différentes parties du cerveau. On ne parle alors cependant pas de « maladie de l’esprit », mais des zones anatomiques cérébrales bien connues, telles que le cortex, l’amygdale ou les noyaux accumbens19,20,21,22. Serait-il alors possible que l’un des plus gros organes du corps humain, la colonne vertébrale et ses nombreux disques, n’ait qu’une responsabilité limitée — voire aucune — dans l’apparition de douleurs lombaires de ces 80 % de mal lotis (voir article « La colonne vertébrale ») ?

On ne sait pas ou ne voit rien ? L’autopsie pourra nous en dire plus !

Depuis qu’André Vésale a pu disséquer des cadavres sans risque de finir sur le bûcher, il est devenu courant à travers le monde de procéder à l’ablation d’organes, sains comme malades, afin de les examiner de plus près23. D’aussi loin qu’on se souvienne, ces autopsies ont permis de comprendre de nombreuses affections. En réalité, les maladies chroniques graves et potentiellement fatales du cœur, des poumons, des vaisseaux sanguins, ou encore le cancer et le diabète ont un impact émotionnel plus fort que celui des douleurs dorsales. C’est pourquoi la recherche sur ces affections dispose de plus d’attentions et de moyens 24,25. C’est pourquoi on entend parler d’investissements à hauteur de 1 000 000 000 000 $ dans le programme américain « US Cancer Moonshot » 26 ou que l’on pourra bientôt, espérons-le, profiter d’un vaccin contre les maladies cardio-vasculaires27.

Il y a peu d’intérêt pour l’autopsie de la colonne vertébrale

Pour des raisons pour le moins imprécises, la médecine ne jusqu’à présent que relativement peu penchée sur les autopsies de la colonne vertébrale et des disques23. Contrairement aux autres organes, il est très complexe d’ôter la colonne vertébrale du corps humain et encore plus de la disséquer efficacement28,29,30,31,32,33. Cela demande plus d’efforts et plus de temps ! La connaissance, c’est le pouvoir, et les gens ne devraient donc débattre que s’ils l’ont34.

Qui peut bien s’intéresser à ce « coussinet » entre les vertèbres ?

La raison pour laquelle les scientifiques, professeurs et docteurs ne témoignent que de si peu d’intérêt envers les disques, je l’ignore. De nombreux cours médicaux et paramédicaux n’abordent pas — ou très peu — la question des disques. Tant que la douleur lombaire chronique sera considérée comme « invisible » ou « un problème psychologique », on n’y attardera pas vraiment. Mis à part les personnes qui commettent un suicide à cause de leurs douleurs lombaires, personne n’est jamais mort d’un mal de dos. Et quand savoir s’il faut prendre le patient au sérieux ? Peut-être aussi que le « mystère » des douleurs lombaires chroniques n’est pas un défi qui flatte l’égo des chercheurs. Il se peut également que cela soit en lien avec le fait que l’enseignement académique continue d’apprendre que les disques sont essentiellement des petits coussins de cartilage inutiles, dont la seule fonction est l’amortissement des chocs.

Dans les articles à venir, nous étudierons plus en détail les données encore peu connues du mystérieux disque.

Références

1 Boden SD, Davis DO, Dina TS et al., ‘Abnormal magnetic-resonance scans of the lumbar spine in asymptomatic subjects. A prospective investigation’, J Bone Jt Surg, 1990,72A:403
2 Friberg S, Hirsch C, ‘The Classic. Anatomical and clinical studies on lumbar disc degeneration’, Clin Orthop Relat Res, 1992, 279:3
3 Buirski G, Silberstein M, ‘The symptomatic lumbar disc in patients with low-back pain. Magnetic resonance imaging appearances in both a symptomatic and control population’, Spine, 1993, 18:1808
4 Moneta GB, Videman T, Kaivanto K et al., ‘Reported pain during lumbar discography as a function of anular ruptures and disc degeneration. A re-analysis of 833 discograms’, Spine, 1994, 19:1968
5 Salminen JJ, Erkintalo M, Laine M et al., ‘Low back pain in the young. A prospective three-year follow-up study of subjects with and without low back pain’ Spine, 1995, 20:2107
6 Boos N, Semmer N, Elfering A et al., ‘Natural history of individuals with asymptomatic disc abnormalities in magnetic resonance imaging. Predictors of low back pain-related medical consultation and work incapacity’, Spine, 2000, 25:1484
7 Luoma K, Riihimäki H, Luukkonen R et al., ‘Low back pain in relation to lumbar disc degeneration’, Spine, 2000, 25:487
8 Carragee EJ, Chen Y, Tanner CM et al., ‘Provocative discography in patients after limited lumbar discectomy. A controlled, randomized study of pain response in symptomatic and asymptomatic subjects’, Spine, 2000, 25:3065
9 Videman T, Battié MC, Gibbons LE e al., ‘Associations between back pain history and lumbar MRI findings’, Spine, 2003, 28:582
10 Lutz GK, Butzlaff M, Schultz-Venrath U, ‘Looking back on back pain: trial and error of diagnoses in the 20th century’, Spine, 2003, 28:1899
11 Federaal Kenniscentrum Gezondheidszorg, ‘Chronische lage rugpijn’, KCE Reports, 2006, Vol 48A
12 Julia Belluz, ‘Doctors finally admit drugs can’t fix most cases of back pain. The American College of Physicians now recommends heat therapy and yoga ahead of pain meds for low back pain’, Vox Topics Trendy, 2017, Feb 14 - [email protected]
13 Verbeke Theo, ‘Pijn. Je hoort nu bij mij. Verhalen van rugpatiënten. Oorzaken en behandelingen’, Uitgeverij Groeninghe, 2011
14 Dalle K, Termonia D, ‘Rugpijn? Beweeg met dat lijf!’, Knack, 14 juni 2017
15 Vermeersch Etienne, ‘Over God’, Uitgeverij Vrijdag, 2016:35
16 Deisseroth Karl, ‘A look inside the brain. A new experimental approach at the interface of chemistry and biology lets scientists peer into the deepest reaches of the body’s master controller’, Scientific American, October 2016:20
17 Green Robert, ‘De 48 wetten van de macht’, Joost Elffers, Meulenhoff, 2010
18 Breasted JH, ‘The Edwin Smith surgical papyrus’, University of Chicago Press (see Google)
19 Apkarian AV, Sosa Y, Sonty S et al., ‘Chronic back pain is associated with decreased prefrontal and thalamic gray matter density’, J Neurosci, 2004, 24:10410
20 Baliki MN, Chialvo DR, Geha PY et al., ‘Chronic pain and the emotional brain. Specific brain activity associated with spontaneous fluctuations of intensity of chronic back pain’, J Neurosci, 2006, 26:12165 21 Baliki MN, Petre B, Torbey S et al., ‘Corticostriatal functional connectivity predicts transition to chronic back pain’, Nat Neurosci, 2012,15:111
22 Hashmi JA, Baliki MN, Huang L et al., ‘Shape shifting pain. Chronification of back pain shifts brain representation from nociceptive to emotional circuits’, Brain, 2013, 136:2751
23 Kaufman SR, ‘Autopsy. A crucial component of human clinical investigation’, Arch Pathol Lab Med, 1996, 120:767
24 WHO 2011, N General Assembly, ‘Political declaration of the High-level Meeting of the General Assembly on the Prevention and Control of Non-communicable Diseases’, http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/66/L.1
25 WHO 2014, ‘Global status report on noncommunicable diseases’, ISBN: 978 92 4 156485 4 (298 pages)
26 Editorial Nature, ‘Back to earth. Success against cancer need not deliver the moon’, Nature, 2016, 530:253
27 King a, ‘The heart-disease vaccin’, Nature, 2018, 555:S23
28 Schmorl G, Junghanns H, ‘Die gesunde und kranke Wirbelsäule in Röntgenbild und Klinik. Pathologisch-anatomische Untersuchungen. 5th Edition‘, Georg Thieme Verlag, Stuttgart, 1968
29 Kakulas BA, Bedbrook GM, ‘Pathology of injuries of the vertebral column with emphasis on the macroscopic aspects’, In: Vinken PJ, Bruyn GW (eds), ‘Handbook of clinical Neurology. Injuries of the spine and spinal cord’, North Holland Publishing Company, Amsterdam, 1976, Vol 25:27-42
30 Bullough PG, Boachie-Adjei O, ‘Slide atlas of spinal diseases’, Gower Medical Publishing, JP Lippincott, New York, 1989:1-207
31 Raushning W, ‘Anatomy and pathology of the lumbar spine’, In: ‘Adult Spine: Principles and Practice. 2nd Edition’, Frymoyer JW (Editor in Chief) Lippincott-Raven Publishers, Philadelphia, 1997
32 Rauschning W, ‘New perspectives in spinal anatomy’, Spine, 2016, 41:S4-S5
33 Declerck Guy MC, ‘Neuropathologic spinal anatomy of all cervical, thoracic and lumbar intervertebral discs in 23.539 consecutive sagittal vertebral autopsies in different types of pathologies. A continuous observation during 50 years’, Observations made at the Department of Neuropathology, University of Western Australia In cooperation with the professors BA Kakulas & JR Taylor and Sir George M. Bedbrook Some data are shown on www.guy-declerck.com
34 Declerck Guy, ‘Rugpijn’, (reactie op Knackartikel met referentie 14 hierboven) Knack, 28 juni 2017

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