Est-ce qu’un ligament déchiré peut occasionner des douleurs dans le bas du dos ?

Aperçu

  • Qu’est-ce qu’un ligament ?
  • Les ligaments se déchirent plus facilement que les muscles et les fibres musculaires
  • L’unique fonction des ligaments
  • Les ligaments dans le dos ne sont aucunement des structures coriaces
  • Fonction des ligaments dans le dos
  • Est-ce que les ligaments dans le dos peuvent ‘se déchirer’ ?
  • Ligaments dans la colonne vertébrale
  • Le ligament jaune d’or
  • Les ligaments situés entre les apophyses transverses (ligaments ‘intertransversaux’)
  • Les ligaments reliant longitudinalement entre elles les vertèbres (LLA & LPL)
  • Les ligaments reliant les apophyses épineuses
  • Examen clinique
  • Ossification bénigne d’un ligament longitudinal antérieur
  • Bibliographie

Qu’est-ce qu’un ligament ?

Un ligament normal est une structure étant à peine à même de se contracter, mais qui est, d’autre part, capable d’offrir une grande résistance lorsqu’on essaie de l’étirer. Le ligament est le mieux comparable à un ressort. Il faut une force énorme pour déchirer le ligament, et cela arrive le plus souvent aux personnes qui ‘parfois exagèrent un peu’ !

Les ligaments se déchirent plus facilement que les muscles et les fibres musculaires

Moins une structure contient de collagène, plus difficile il est de la ‘stretcher’. Les ligaments contiennent beaucoup moins de fibres collagènes élastiques que les tendons musculaires, qui, eux, possèdent beaucoup moins de protéines collagènes que les muscles mêmes. Les ligaments ne peuvent à peine être ‘stretchés’. Ils s’étirent donc plus difficilement que les muscles et les tendons. Lorsqu’ils sont soumis à de grandes forces actives, comme c’est le cas durant la pratique des sports à contact, ces structures fortes et coriaces vont se déchirer beaucoup plus facilement1,2,3.

L’unique fonction des ligaments

Comme ils contiennent peu de collagène élastique, la fonction de ces structures coriaces se limite à relier entre eux deux os. Ainsi p. ex., les ligaments du genou rattachent le fémur au tibia et ceux de la cheville font de même pour le tibia et les calcanéums. Malheur à vous, si votre genou attrape un coup ou si vous vous faites une entorse du pied : les os se distendent un peu, et cela peut être bien douloureux !

Les ligaments dans le dos ne sont aucunement des structures coriaces

Les six ligaments dans le bas du dos diffèrent énormément des ligaments beaucoup plus solides dans les autres articulations du corps. En outre, ils ne relient pas deux os, mais plusieurs vertèbres ou éléments de vertèbre. Et parce qu’ils contiennent très peu ou même pas de fibres collagènes, ils ne sont tout simplement pas suffisamment solides pour servir de ‘véritables’ ligaments4,5.

Fonction des ligaments dans le dos

Les ligaments dans le dos ne servent que de câbles de sécurité. Ils sont uniquement capables d’empêcher des positions extrêmement penchées. Lorsque, dans ce cas, ils sont soumis à de grandes tensions et s’étirent tout de même, ils accumulent de l’énergie élastique nécessaire pour se redresser. Par cette action, ils contribuent à ce que les muscles du dos doivent travailler moins dur6,7.

Est-ce que les ligaments dans le dos peuvent ‘se déchirer’ ?

Les déchirures de ligament dans le dos surviennent quasi exclusivement chez les personnes de taille moyennement longue, qui, en plus, doivent se pencher très en avant. Les ligaments sont soumis à des tensions tellement fortes qu’ils se déchirent.

Ligaments dans la colonne vertébrale

Le dos contient 6 ligaments (Figure 1), qui cependant ne sont pas très solides. ls doivent leurs noms difficiles aux éléments vertébraux qu’ils rattachent (voir blog ‘La colonne vertébrale’).

Ligament dans la colonne vertébrale

Figure 1. Les noms ‘difficiles’ de cinq des six ligaments dorsaux se rapportent aux éléments vertébraux qu’ils relient. Un parmi ces ligaments a été doté par la nature d’une couleur jaune d’or et a pour cette raison été nommé ‘ligamentum flavum’.

Le ligament jaune d’or

Le ligament ‘jaune d’or’ (Figure 1) n’est en réalité pas un véritable ligament parce qu’il contient très peu de collagène. Il doit sa couleur à la présence presque exclusive de fibres d’élastine qui lui confèrent ses propriétés élastiques8,9.

Les ligaments situés entre les apophyses transverses (ligaments intertransversaux)

Il est impossible de palper les apophyses transverses dans le dos (voir ‘transverse processes’ dans le blog ‘Radiologie de la colonne vertébrale’), mais elles sont reliées entre elles à gauche et à droite par de minces pellicules collagènes, nommées ‘ligaments intertransversaux'. Ces pellicules sont comparables à des membranes qui séparent les muscles situés au devant de la colonne vertébrale de ceux situés en arrière. En plus, il ne s’agit pas de ligaments proprement dits parce que, étant des prolongements des muscles, ils contiennent trop de collagène et sont donc, tout comme les muscles, susceptibles d’être étirés10.

Les ligaments reliant longitudinalement entre elles les vertèbres (LLA & LPL)

Il y a deux ligaments collagènes reliant les vertèbres à partir de la base crânienne jusqu’au sacrum (Fig. 1) : au devant le ligament longitudinal antérieur (LLA) et en arrière le ligament postérieur longitudinal (LPL).

La plupart des fibres collagènes du LLA sont des prolongements des muscles du diaphragme. C’est un muscle large, gros et solide qui, au devant, est solidement rattaché aux corps vertébraux et plutôt faiblement aux disques intervertébraux. Il empêche que les grands vaisseaux sanguins au niveau de l’abdomen, tels l’aorte et la veine cave, se frottent contre d’éventuelles apophyses osseuses des corps vertébraux (les ostéophytes).

Le LPL, étant un lien beaucoup plus mince, est rattaché fermement aux discs intervertébraux, et plutôt faiblement à l’arrière des corps vertébraux. Ce ‘ligament’ peut empêcher une éventuelle migration du matériel discal vers le centre du canal rachidien. C’est pour cette raison qu’une hernie discale survient rarement au niveau central.

Il est impossible de vérifier cliniquement si le LLA et le LPL sont lésés ou non11,12,13.

Les ligaments reliant les apophyses épineuses

Il y a moyen de palper sous-cutanément les apophyses sur la médiane du dos. Le ligament situé entre ces éléments des vertèbres (voir ‘spinous processes’ dans le blog ‘Radiologie de la colonne vertébrale’) se nomme ligamentum spinale. Ce ligament reliant ces éléments par le dessus, se nomme ligamentum supraspinale (Figure 1). Ce sont des prolongements tendineux solides et coriaces de différents muscles dorsaux1,2. Les fibres des deux ligaments se fondent et fonctionnent comme une unité14,15,16.

Le ligament supra-spinal est l’unique structure susceptible d’être palpée très distinctement par chacun sur la médiane dorsale entre les apophyses épineuses, également distinctement palpables. Suite à des activités très intenses14,17, des lésions peuvent se produire dans ce complexe musculo-tendineux18,19,20. L’injection de substances anesthésiantes dans ce complexe ligamentaire permet rarement – seulement dans 10% des cas – d’enlever la douleur dans le bas du dos21.

Examen clinique

Il n’existe aucun test clinique valable permettant de tester objectivement un des 6 ligaments dans le bas du dos.
Jusqu’à présent, aucun ligament dorsal n’a été examiné de manière scientifique sérieuse pour voir si une luxation ou une déchirure peut occasionner la douleur dans le bas du dos12. On ne peut donc que soupçonner qu’un ‘ligament’ dans le dos soit la cause possible de douleurs dans le bas du dos.

Ossification bénigne d’un ligament longitudinal antérieur

Etes-vous une personne obèse, atteinte de diabète et ayant plus de cinquante ans ? Alors, vous avez une chance de 15 % à 25 % que le gros ligament au devant de la colonne vertébrale (LLA) s’ossifiera de manière spontanée. Cette pathologie ankylosante aandoening, nommée ‘spondylose ankylosante’, se présente auprès de 25% des femmes et 35% des hommes ayant dépassé l’âge de 80 ans22,23,24. Comme, à l’opposé d’une autre pathologie ankylosante importante, notamment la spondylite ankylosante ou la maladie de Bechterew (voir blog ‘‘spondylite ankylosante ou maladie de Bechterew’), les phénomènes inflammatoires sont totalement absents, le patient ne ressent aucune douleur, mais sera graduellement atteint d’une limitation de sa mobilité dorsale.

Bien que les images radiologiques offrent des caractéristiques tout à fait typiques, notamment des înées osseuses raboteuses25,26, ces constats sont très souvent interprétés de manière erronée comme de l’arthrose. C’est donc tout à fait à tort qu’on prescrira des médications anti-inflammatoires à ces patients. Ces constats radiologiques se font à quelques endroits spécifiques de la colonne vertébrale (surtout au niveau des 5e, 6e et 7e vertèbres (cervicales), des 7e, 8e, 9e et 10e vertèbres (thoraciques) et de la 3e (lombaire)) et se ressemblent à des bougies coulantes (Figures A et B).

Cette affection probablement génétique peut également s’accompagner d’ossifications dans les ligaments d’autres articulations. Elle peut occasionner ensuite des symptômes de raideur dans la hanche, le genou, l’épaule, le coude et les petites articulations des mains et des pieds. Les ossifications dans les articulations des mains et des pieds sont plus gênantes parce qu’elles entravent la fonctionnalité. On nomme cette raideur progressive ‘hyperostose squelettique diffuse idiopathique’ ou ‘HSDI’.

Ligament dans la colonne vertébrale

Fig. A Gauche : Image d’une bougie coulante placée sur un goulot. Milieu : image radiologique comparée d’un large pont osseux situé antérieurement et enjambant les 5e, 6e et 7e vertèbres (cervicales). A droite, on voit, du côté antérieur droit de la colonne vertébrale cervicale, une traînée osseuse large au niveau de C4 jusqu’à T1. Remarquez la luxation (fatale) due à une fracture au niveau de C5-C6 (Declerck / Kakulas, Neuropathology, Perth, Western Australia, dossier X84-86).

Ligament dans la colonne vertébrale

Fig. B. Une traînée très dense, ondulante et raboteuse s’est formée du côté antérieur droit au niveau des 7e, 8e, 9e et 10e vertèbres thoraciques. L’ossification s’étend aussi vers le devant sur les disques intervertébraux, engendrant un raidissement local (ankylose). Les disques intervertébraux présentent des phénomènes de vieillissement normaux (Declerck / Kakulas, Neuropathology, Perth, Western Australia, dossier X88-610).

Bibliographie

1 Schechtman H, Bader DL, ‘In vitro fatigue of human tendons’,
J Biomech, 1997, 30:829
2 Schechtman H, Bader DL, ‘Fatigue damage of human tendons’,
J Biomech, 2002, 35:347
3 Zhang J, Wang JH, ‘Mechanobiological response of tendon stem cells. Implications of tendon homeostasis and pathogenesis of tendinopathy’,
J Orthop Res, 2010, 28:639
4 Mykleburst JB, Pintar F, Yoganandan N et al., ‘Tensile strength of spinal ligaments’,
Spine, 1988, 13:526
5 Pintar FA, Yoganandan N, Myers T et al., ‘Biomechanical properties of human lumbar spine ligaments’,
J Biomech, 1992, 25:1351
6 Kumar S, ‘The physiological cost of three different methods of lifting in sagittal and lateral planes’,
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7 Gracovetsky S, Farfan H, ‘The optimum spine’,
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8 Nachemson AL, Evans JH, ‘Some mechanical properties of the third human lumbar interlaminar ligament (ligamentum flavum)’,
J Biomech, 1968, 1:211
9 Hukins DW; Kirby MC, Sikoryn TA et al., ‘Comparison of structure, mechanical properties, and functions of lumbar spinal ligaments’,
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10 Jiang H, Raso JV, Moreau MJ et al., ‘Quantitative morphology of the lateral ligaments of the spine. Assessment of their importance in maintaining lateral stability’,
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11 Neumann P, Keller T, Ekström L et al., ‘Structural properties of the anterior longitudinal ligament. Correlation with lumbar bone mineral content’,
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12 Merskey H, Bogduk N, ‘Classification of chronic pain. Descriptions of chronic pain syndromes and definitions of pain terms’ (2nd ed),
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13 Kotani Y, Cunningham BW, Cappuccino A et al., ‘The effects of spinal fixation and destabilization on the biomechanical and histologic properties of spinal ligaments. An in vivo study’,
Spine, 1998, 23:672
14 Adams MA, Hutton WC, Stott JR, ‘The resistance to flexion of the lumbar intervertebral joint’,
Spine, 1980, 5:245
15 Dumas GA, Beaudoin L, Drouin G, ‘In situ mechanical behavior of posterior spinal ligaments in the lumbar region. An in vitro study’,
J Biomech, 1987, 20:301
16 Gillespie KA, Dickey JP, ‘Biomechanical role of lumbar spine ligaments in flexion and extension. Determination using a parallel linkage robot and a porcine model’,
Spine, 2004, 29:1208
17 Wilson AM, Goodship AE, ‘Exercise-induced hyperthermia as a possible mechanism for tendon degeneration’,
J Biomech, 1994, 27:899
18 Rissanen PM, ‘The surgical anatomy and pathology of the supraspinous and interspinous ligaments of the lumbar spine with special reference to ligament ruptures’,
Acta Orthop Scand, 1960, 46 Suppl:1
19 Köhler R, ‘Contrast examination of lumbar interspinous ligaments’,
Acta Orthop Scand, 1962, 33(Suppl 55):3
20 Fujiwara A, Tamai K, An HS et al., ‘The interspinous ligament of the lumbar spine. Magnetic resonance images and their clinical significance’,
Spine, 2000, 25:358
21 Wilk V, ‘Pain arising from the interspinous and supraspinous ligaments’,
Austral Musculoskel Med, 1995, 1:21
22 Forestier J, Rotes-Querol J, ‘Senile ankylosing hyperostosis of the spine’,
Ann Rheum Dis, 1950, 9:321
23 Weinfeld RM, Olson PN, Maki DD er al., ‘The prevalence of diffuse idiopathic skeletal hyperostosis (DISH) in two large American Midwest metropolitan hospital populations’,
Skeletal Radiol, 1997, 26:222
24 Sarzi-Puttini P, Atzeni F, ‘New developments in our understanding of DISH (diffuse idiopathic skeletal hyperostosis)’,
Curr Opin Rheumatol, 2004, 16:287
25 Resnick D, Niwayama G, ‘Radiographic and pathologic features of spinal involvement in diffuse idiopathic skeletal hyperostosis (DISH)’,
Radiology, 1976, 119:559
26 Declerck GMC, ‘Neuropathologic spinal anatomy of all cervical, thoracic and lumbar intervertebral discs in 23.539 consecutive sagittal vertebral autopsies in different types of pathologies. A continuous observation during 50 years’. Observations made at the Department of Neuropathology, University of Western Australia, in cooperation with professors BA Kakulas & JR Taylor and Sir George M. Bedbrook - Serial publications on website www.guy-declerck.com

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